L'élégance du Hérisson
"Mme Michel, elle a l'élégance du hérisson : à l'extérieur, elle est bardée de piquants, une vraie forteresse, mais j'ai l'intuition qu'à l'intérieur, elle est aussi simplement raffinée que les hérissons, qui sont des petites bêtes faussement indolentes, farouchement solitaires et terriblement élégantes."
Mme Michel c'est la concierge, aimable comme une porte de prison, l'oeil de hareng pas frais et l'haleine "auto-incommodante" comme elle le dit elle-même. La remarque du hérisson vient de Paloma, 12 ans et le QI d'Einstein.
Tout ce petit monde cohabite 7 rue de Grenelle, dans un immeuble haussmanien où le luxe n'est qu'un euphémisme et où chacun en prend pour son grade (psy, bourgeois de droite et de gauche, ministres, normaliennes, chiens, chats ...).
C'est délicieux. Acide, amer mais tendre sous la dent. Parfois un peu difficile à lire (j'ai eu du mal à tout digérer), certaines phrases tombent cependant sous le sens :
"La littérature, par exemple, a une fonction pragmatique. Comme toute forme d'Art, elle a pour mission de rendre supportable l'accomplissement de nos devoirs vitaux." ou "La vérité n'aime rien tant que la simplicité".
Les mots sont beaux et l'émotion pécieuse, comme par exemple ce rituel du thé, si magnifiquement décrit et qui résume si bien la plénitude des après-midi au bord d'une tasse de thé en compagnie de K. ou les gestes du matin, qui chaque jour m'aident à me réveiller.
"Le rituel du thé, cette reconduction précise des mêmes gestes et de la même dégustation, cette accession à des sensations simples, authentiques et raffinées, cette licence donnée à chacun, à peu de frais, de devenir un aristocrate du goût parce que le thé est la boisson des riches comme elle est celle des pauvres, le rituel du thé, donc, a cette vertu extraordinaire d'introduire dans l'absurdité de nos vies une brèche d'harmonie sereine."
C'est un livre qui parle de fleurs et notamment de camélias mais qui jure sur l'inutilité des fleuristes (zut moi qui voulais faire fleuriste quand je serais grande) et des coiffeurs avant de revenir quand même sur les coiffeurs : parce que finalement quand on en sort, on est plus beau qu'avant (ce qui n'est malheureusement pas vrai pour tous ...croyez moi, ou pas).
C'est aussi un roman qui vous donne envie d'en relire un autre : Anna Karénine de Tolstoi et de prénomer vos chats : Kitty et lévine (c'est plus classe que jonathan et jennifer), dommage que je sois allergique aux chats.
C'est un livre que j'ai eu beaucoup de plaisir à lire et que je relirai sûrement. Une petite béquille pour les mauvais jours où je peine à trouver un sens à ma vie.
Bref un beau cadeau à offrir à quelqu'un que vous aimez bien.
NB : Vous pouvez retrouver la poesie de Muriel Barbery sur son blog.
NB2 : La semaine prochaine, je vous parle de l'autre livre de Muriel Barbery : une gourmandise que j'ai déjà lu 2 fois et offert 4 ! A ne pas lire le ventre vide !